vendredi 25 janvier 2008

Leipzig 1813 : la bataille des nations et son souvenir- Völkerschlacht

Avant de lire les messages qui portent sur la période 1870-1945, jetons un coup d'oeil dans le rétroviseur des relations entre la France et l'Allemagne, à une époque où cette dernière n'existait pas en tant qu'Etat.


En octobre 1813, les troupes de Napoléon sont défaites à Leipzig (Saxe) par une coalition associant les Russes, les Prussiens, les Autrichiens (les Suédois et les Anglais aident au financement). Un demi-million de soldats y ont combattu, un sur cinq y a laissé la vie. Particularité souvent oubliée, les Saxons sont alliés aux Français, ce qui a pu rendre ambigüe la mémore de la bataille dans la région. La période napoléonienne contribue à la prise de conscience par les Allemands de leur destin commun.


L'idée de construire un monument commémoratif au sud de Leipzig est très vite apparue nécessaire, parmi les participants à la bataille notamment.




En 1894, le jeune architecte de Leipzig, Clemens Thieme, fonde la "Confédération patriotique allemande pour la construction d'un ouvrage à la mémoire de la bataille des nations". Des souscriptions sont lancées, des loteries organisées. La ville de Leipzig offre un terrain. Pour le projet, on préfère une architecture "archaïque", comme s'il tirait son origine de la nuit des temps. Cette ambition se basait sur la recherche d'un style typiquement allemand, de sorte qu'aucun emprunt au clacissisme, au baroque français ou à la renaissance italienne ne soit perceptible.
Les travaux commencent le 18 octobre 1895 et se poursuivent jusqu'au 13 mai 1912. Le bâtiment était prêt pour le centenaire de la bataille.


Le mémorial

"Trois devises sont à la base de l'ouvrage et doivent trouver leur conformité dans le parties principales du monu­ment. Entre les deux murs latéraux de soutènement, s'élève un relief de 60 mètres de large représentant une scène de la bataille : La statue centrale est la sculpture de Saint-Michel portant une épée de feu, assis sur un char fonçant vers le front de bataille. A ses côtés, des furies portent les tor­ches de la guerre et deux énormes aigles s'élèvent dans les cieux, annonçant la liberté remportée. Les deux têtes de Barbarossa dans les montées d'escalier, doivent rappeler la légende de l'empereur Barberousse sommeillant et exprimer l'espérance du peuple en des temps meilleurs, qui maintenant ont redémarré.

Après avoir gravi 136 marches, le visi­teur entre dans la crypte de l'édifice. Elle est conçue comme un sépulcre symbolique pour les morts au combat. Seize guerriers, têtes baissées, font une veillée funèbre. Huit masques mortuaires de presque 6 mètres de haut symbolisent la mort.


Dans la partie centrale, le dit temple de la gloire, quatre énormes statues doivent représenter de façon allégo­rique les qualités du peuple allemand pendant la guerre d'indépendance :

La bravoure

Les bras tendus comme pour faire éclater des chaines invisibles. Les muscles bandés se dessinent nettement dans l'effort violent.

La force en la foi

Sérénité et confiance rayonnent. Dans le giron de cette confiance en un meilleur avenir, se trouve la génération future. Défenseur et refuge sont ici représentés par un garçon.

La force du peuple

Deux enfants se rapprochant symboli­sent la rajeunissement perpétuel de la force du peuple.

L'offrande

Une main tendue, offrant un fruit en symbole de résultat du propre travail rappelant le verset de la bible selon lequel une main donnant ne doit pas savoir ce que l'autre fait.

Ces colosses de 9,5 mètres de haut et de 400 tonnes chacun se montrent puissants et un peu effrayants pour le spectateur. 96 statuettes d'à peine un mètre de haut ornent de plein relief les piliers principaux des fenêtres à encadrement de plomb. Elles doivent mettre en évidence le désaroi des familles des morts au com­bat ainsi que la souffrance de la guerre. 68 mètres au-dessus de la crypte se voûte le dôme fermant la partie haute de l'espace intérieur. 324 statues de cavaliers, presque grandeur nature, incarnent les vainqueurs de retour au foyer.

La couronne à l'extrémité de l'édifice représente un avertissement pour les générations à venir. Douze guerriers appuyés sur leurs épées symbolisent la détermination du peuple à défendre leur indépendance, chacune de ces 47 statues de granit étant haute de 13 mètres et pesant 200 tonnes. De la ctypte, les 364 marches de l'escalier en colimaçon mènent à la plate-forme panoramique se situant à 91 mètres de hauteur.

Tous les ans, des dizaines de milliers de personnes apprécient ce splendide panorama sur la ville."

Sur un plan strictement esthétique, le monument, comme la plupart des monuments, ne se distingue pas par sa splendeur, mais il nous semble intéressant d'étudier les motivations et les sentiments de ceux qui l'ont construit.

L'inauguration de ce mémorial en 1913 prend évidemment une signification particulière dans le contexte des relations tendues avec la France (question marocaine, loi portant le service militaire à 3 ans en 1911,...). Rappeler une défaite française en choisissant de glorifier le passé germanique permet au Kaiser Guillaume II d'utiliser le passé à des fins politiques et diplomatiques évidentes.

Le monument vu du ciel. Ma source pour cet article, une brochure en français du Stadgeschichtliches Museum de Leipzig dont voici le site. 2008 est l'année du 195ème anniversaire de la bataille et du 95ème anniversaire du monument.

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